Dominique Petitgand, À la merci (At the mercy), extrait transcription, 1988/2011, courtesy gb agency, Paris. |
Ballons, ambiance de fête, voix d’hommes, de femmes, d’enfant... Dominique Petitgand nous lance une invite à l’écoute et au-delà...
Quatre installations, minimales, disposées dans l’espace, constituées d’enceintes, certaines au sol, d’autres suspendues… Des moniteurs aussi… Au nombre de trois.
Quatre « pièces sonores » -appelation que Dominique Petitgand donne à ses travaux- sont diffusées dans chacune de ces installations.
Installations minimales dont pourtant la présence monacale investit la totalité de l’espace… Où ici, le moindre, le modeste prend une réelle ampleur plastique et sonore…
Ces installations ouvrent de toute évidence sur un travail lié au déploiement des sources sonores, de leur répartition, de leur réception. Les dispositifs proposés, tiennent compte du lieu de diffusion, de sa configuration, de ses spécificités. Chacune de celles-ci dispose de sa propre spatialisation, de sa propre autonomie, de sa propre amplitude, mais aussi au-delà de leurs spécificités viennent créer un ensemble dans lequel elles se répondent…
Elles ouvrent aussi sur le « comment » de la perception, stimulant l’interaction physique et psychique…
Dominique Petitgand, vue d'exposition, gb agency, Paris, 2011 crédit photo : Marc Domage |
Investir un champ plus large que la matière sonore, créer l’espace, venir jouer de notre imaginaire, ces petites installations, ces « petites pièces » engendrent évidemment ce que l’on pourrait communément appeler des paysages sonores, mais accordent une attention particulière à l’écoute… Il ne s’agit pas seulement de se laisser entrainer dans un univers : la voix, par le support des mots, est le matériel principal et sollicite de notre part une plus grande attention que le simple fait de « voyager » dans le son… L’écoute d’une voix induit aussi ce processus : tenter de trouver une incarnation à cette voix. Cette incarnation vient peser par son absence, impalpable et pourtant si proche, dans cette présence des voix…
Dominique Petitgand, vue d'exposition, gb agency, Paris, 2011 crédit photo : Marc Domage |
La disposition des enceintes sépare, entraine une recomposition de l’espace physique de la galerie et donc de notre propre positionnement dans celui-ci. Cette distribution de la matière sonore vient reconfigurer cet espace en des jeux de réponses, de hors-champs, de points de vues, le tout selon notre circulation dans la pièce.
Par exemple, « je m’en vais », installation sonore de cinq hauts-parleurs, joue de ces propriétés du langage cinématographique. La voix d’une jeune femme nous fait part de son envie de quitter une soirée, un repas… Cette voix est isolé et en opposition physique et sonore aux quatre autres haut-parleurs qui eux diffusent les rumeurs de la soirée… « Je m’en vais » recrée un univers totalement fictionnel, où l’imaginaire vient se substituer aux images.
Dominique Petitgand, vue d'exposition, gb agency, Paris, 2011 crédit photo : Marc Domage |
Notre point de vue varie donc alors selon notre position physique dans l’espace. Du côté de la femme, en Off la fête, et évidemment du côté de la fête… Ce point de vue est renforcé par l’intégration dans une séparation physique créé par une colonne préexistante dans l’espace d’exposition, où là se concrétise cette grande attention donnée par Petitgand aux lieux, aux espaces…
Les installations de Dominique Petitgand se font aussi ludiques de prime abord ; comme « A la merci », inversion des rôles où l’adulte devient élève, : un jeune enfant fait reprendre des mots, à un adulte qui peine à les répéter, le ton de l'enfant se faisant, parfois, agacé face aux difficultés élocutoires de l’homme. Inversion de l’apprentissage d’une langue… jeu sur la répétition des mots, travail sur la tessiture.
Dominique Petitgand, vue d'exposition, gb agency, Paris, 2011 crédit photo : Marc Domage |
Cet effet de redoublement, de jeu d’intonations, instaure aussi un subtil jeu entre le signe et le son, jeu d’autant plus troublant que les mots prononcés s’inscrivent comme des sous-titres, en anglais, sur un moniteur. Ces sous-titres viennent perturber notre réception, comme mentalement relire et prononcer les mots en anglais, « A la merci » tout d’abord ludique, inoffensif, puis peu à peu, perturbant, nous engagent à une réflexion sur les mécanismes du langage et de son appréhension…
Cette dernière installation aussi, où l’on entend des ballons, rebonds, frottements jeu de ping pong entre les quatre murs de la pièce, cour de récréation, renvoi ludique là encore à cet enfant d' « A la merci », mais aussi redoublement des sons... Ce ballon devient insaisissable, inlocalisable, d’où surgira-t’il ? Quel point de vue adopter?
Et nous voici pris un peu comme dans la balle au prisonnier…
Et, détail qui a son importance si vous écoutez bien, du côté de la rue, d’autres bruits d’enfants, de ballons viendront se mêler à de Dominique Petitgand, un hasard ? Pas si sûr…
Dominique Petitgand
« Solo show »
Du 17 mars au 30 avril 2011
gb agency
18 rue des 4 Fils F-75003 Paris
T +33 (0)1 44 78 00 60
gb@gbagency.fr
http://www.gbagency.fr/