La
triennale BEAUFORT 04, après sa dernière édition consacrée aux hommes et la mer,
s’empare de l’Europe comme thèmatique. Elle s’étend sur environ 65 kilomètres
de littoral ! En effet, plusieurs artistes, 20 au total sont invités à
installer leurs œuvres le long du littoral belge. La thématique de l’Europe,
des échanges européens n’est pas sans résonner avec une certaine actualité. Le
choix de ce thème tombe à point nommé.
Des
artistes venant de Finlande, Suisse, Belgique, Malte ont répondus présent.
Beaufort 04 ne se définit pas et c’est là, l’une des intelligences de ses choix
dans une Europe strictement politique, mais dans une Europe géographique. Pour
reprendre les propos de Philp Van den Bossche, jeune commissaire de BEAUFORT 04
et directeur de Mu.ZEE. « …Cette
manifestation mise sur des récits d’artistes européens. Non des contes
nationaux mais des œuvres, indirectes, plurivoque, nuancées. Les artistes nous
invitent à dépasser là où les histoires nationales qui nous sont propres, sont
souvent subjectives… ».
Waiting tthe climate " Isaac Cordal |
Des
récits, des propositions, souvent différentes les unes des autres, qui se
placent au-delà du formel, car au-delà de l’Europe, cette triennale interroge
le statut de l’œuvre d’art placée dans l’espace public, comment elles jouent,
se fondent ou s’opposent à cet espace. Discrètes, mimétiques ou alors voyantes,
imposantes, monumentales, comme celle de Bernard Vent, d’autres se fondent dans
le paysage comme celle de Kounellis ou des frères Chapuisat, certaines relèvent
de l’infra-mince comme celle réalisée dans la maison Hurlebise par Nedko
Solakav, petites écritures dispersées comme un jeu de piste dans une maison.
The mumbling" Nedko Solakov |
Une
thématique domine, celle de l’écologie comme par exemple la proposition de
Marco Casagrande.
Certaines
oeuvres seront pérennes, d’autres non, cette donnée joue aussi sur le choix des
matériaux, des évolutions de l’œuvre dans le temps, de l’usure, du pari engagé.
Pourquoi cette œuvre plutôt qu’une autre. Comment vous-elles se fondre,
s’adapter au public mais surtout aux habitants qui seront amenés à vivre avec
elles quotidiennement. Se pose ici la question du monument public, cette
question est large, elle va des monuments aux morts commémoratifs à des œuvres
vivantes.
"tripod" Zilvinas Kempinas |
Cette triennale interroge les rapports
de l’architecture et de l’intégration des œuvres dans celle-ci notamment sur une côte bétonnée où
les espaces sauvages sont rares… Elle pose le principe de la commande publique
car une partie des œuvres sont achetées à l’instar de « la tortue » de Jan
Fabre.ou des drapeaux de Buren.
"Sandmord" Marco Casagrandre |
Comment
appréhender ses œuvres, pour la plupart des sculptures, dans leurs
globalités ? Il est évident qu’elles entament un dialogue entre elles mais
aussi avec les œuvres des éditions précédentes devenues pérennes. Faut-il les
appréhender chacune d’entre elle comme une entité à part, comme des éléments
isolés et autonomes ? Les cheminements sont multiples. D’ailleurs, la
proposition essentielle de cette biennale est bien celui-ci ! Comment
embrasser une globalité ? Comment s’amputer de cette globalité ? On
ne peut que répondre : le choix se fait de soi-même comme il en est ainsi dans
les allées d’une foire, d’une biennale. Des œuvres nous interpellent, nous
attirent, d’autres nous repoussent, nous éloignent. Cet enjeu tient son
importance pour un public pour la plupart néophytes.
"tritons" flo koearu |
Une belle confrontation et
aussi un beau voyage qui recèle bien des secrets dans les interstices de ses
barres bétonnées… Un public estival de vacanciers… Et puis qui a dit qu’il
pleuvait sans cesse dans le Nord ?
Valéry Poulet